🇬🇧 English below
🪂 La fameuse redescente du sommet… Nous en saurons plus lundi prochain, une fois papa rentré en France.
⏳ Lundi. 9h du matin. Restez connectés.
J’ai quand même demandé à papa des détails. Parce qu’arriver en haut, c’est une chose, mais pouvoir redescendre, c’en est une autre…
“Le hasard a fait que la descente s’est déroulée en deux phases. Je tenais absolument à récupérer mon bivouac à 6600 m lors de la descente. Au fond de moi, je savais pertinemment que je n’aurais plus la volonté de remonter le chercher une fois au camp de base.
Lorsque je me suis écroulé à côté de ma tente, même si je n’étais encore qu’au premier tiers de la face sud du K2, j’étais convaincu que j’avais réussi !
Que, seul, comme un grand, j’avais réalisé mon objectif, ce vieux rêve : le K2, hors des sentiers battus, sans O2. La cerise sur le gâteau était de, sans l’avoir vraiment voulu, être parti seul. Je ne parlerai pas de solo mais d’aventure solitaire.
En effet, l’objectif de départ étant de voler du sommet, il était impensable d’abandonner qui que ce soit sur la montagne. Il allait donc de soi d’envisager ce projet, seul.
À quoi pense-t-on donc lorsqu’on réalise que c’est fini, qu’on a réussi ?
Eh bien, très sincèrement, on pense à tous ceux qui ont pensé à nous, à tous ceux qui nous ont encouragé et soutenu, à cette équipe incroyable au camp de base qui nous a chouchoutés et qui a prié les dieux pour nous, à toute cette chaîne incroyable, depuis l’émergence du projet jusqu’à sa réalisation. Je pense à toute la préparation, les entraînements avec les copains, les belles rencontres lors de la recherche de financement, les cadeaux « raclette » de dernière minute ou une enveloppe de soutien cachée dans la pile de bois, des porteurs aux muletiers, des collègues italiens ou népalais bienveillants du camp de base... Bref, on se dit que jamais ce projet n’aurait été réalisable seul, sans sa chérie, sans sa fille.
On se dit qu’il va y avoir un tas de monde à remercier, qu’il va falloir avoir le foie bien accroché avec tous les canons qu’il va falloir boire les mois prochains, qu’il est bon de savourer égoïstement ce soir cette incroyable réussite et la chance de s’être faufilé au milieu du K2.
Cette dernière soirée à 6600 m, j’ai l’intention de la déguster, elle n’est rien que pour moi. Les gorgées de thé sucré, je les savoure petit à petit. Elles sont incroyables. Mon estomac, après 40 heures d’effort, est trop noué et, par habitude, je ne cherche pas à forcer. Je boirai juste ce qu’il faut, me glisserai dans mon sac de couchage en plus de la combinaison d’altitude et, bizarrement, je n’aurai même pas froid aux pieds. Qu’il fait bon être épuisé ! Rincé ! Et d’aimer la terre entière !
Ma minuscule tente est surplombée d’une muraille de glace phénoménale. Ici, bien que la menace soit horriblement présente, je dors paisiblement, la tête dans les étoiles. J’ai laissé le zip de la porte grand ouvert.
Demain, au camp de base, je sais que l’engrenage des félicitations et de la vie collective ne me laissera aucun répit. Alors je souris, seul, bêtement et naïvement. Je suis très, très heureux.”
-Blutch
🇬🇧Coming back down to earth ⭐️🏔️
Inside Blutch's mind, for one last night, on K2
🪂 The famous descent from the summit… We’ll know more next Monday, once Dad is back in France.
⏳ Monday. 9 AM. Stay tuned.
I still asked Dad for details. Because reaching the top is one thing, but being able to come back down is another…
“By chance, the descent unfolded in two phases. I was absolutely determined to get my bivouac at 6600 m on the way down. Deep inside, I knew well that I wouldn’t have the will to go back up and get it once I reached base camp.
When I collapsed next to my tent, even though I was still only at the first third of the south face of K2, I was convinced that I had succeeded!
That, alone, like an old man, I had achieved my goal, this old dream: K2, off the beaten path, without O2. The cherry on top of the cake was that, without really planning it, I had set off alone. I wouldn’t call it a solo climb, but a solitary adventure.
Indeed, since the initial goal was to fly from the summit, it was unthinkable to leave anyone behind on the mountain. So, it made perfect sense to undertake this project alone.
So, what was I thinking when realizing that it’s over, when you know you did it?
Well, quite sincerely, you think about everyone who thought of you, everyone who encouraged and supported you, this incredible team at base camp who pampered us and prayed to the gods for us, this entire amazing chain from the project's inception to its realization. I think of all the preparation, the training with friends, the wonderful friends made during the search for funding, the last-minute ‘raclette’ gifts or an envelope of cash hidden in the woodpile, the porters and muleteers, the kind Italian and Nepali colleagues at base camp... In short, you realize that this project would never have been possible alone, without your partner, without your daughter.
You realize there will be a lot of people to thank, that you’ll need to brace yourself for all the drinks you’ll have to down in the coming months, that it’s good to selfishly savor tonight this incredible success and the luck of having slipped through K2.
This last evening at 6600 m, I intend to relish it, it is just for me. The sips of sweet tea, I savor them little by little. They are incredible. My stomach, after 40 hours of effort, is too knotted and, out of habit, I don’t try to push it. I’ll drink just what I need, slip into my sleeping bag on top of my altitude suit, and strangely, I won’t even have cold feet. How good it feels to be exhausted! Drained! And to love the whole world!
My tiny tent is overshadowed by a phenomenal wall of ice. Here, though the threat is horribly present, I sleep peacefully, with my head in the stars. I’ve left the zipper of the door wide open.
Tomorrow, at base camp, I know the whirlwind of congratulations and communal life will give me no rest. So I smile, alone, foolishly and naively. I am very, very happy.”
-Blutch
Et bien , même si je n’ai que une seule fois eu la chance de faire un trek dans les alpes françaises avec blutch (que nous appelions les filles et moi , bien sagement Jean Yves ) je suis tellement heureuse de suivre son histoire incroyable ! Quelle exemple d’humilité , équilibre, amour de la montagne et de ses limites et tout le reste . Du fond de moi-même : bravo pour ton exploit dans toutes ses facettes ! Kiki